Absence de constitution d’une servitude de passage
Voici un litige né entre deux particuliers au sujet de l’existence d’une servitude de passage qui aurait été instituée sur un chemin d’accès appartenant au défendeur. Dans cette affaire, le Cabinet Champauzac représentait ledit défendeur à l’instance, lequel s’opposait à reconnaître l’existence d’une telle servitude sur son chemin.
À titre liminaire, on rappellera qu’en vertu des dispositions de l’article 637 du Code civil, dont la version demeure d’ailleurs inchangée depuis l’adoption dudit code en 1804, « une servitude est une charge imposée sur un héritage pour l’usage et l’utilité d’un héritage appartenant à un autre propriétaire ». Autrement dit, la servitude est un droit réel de jouissance établi sur un bien appartenant à autrui : celle-ci est instituée au profit d’un fonds dominant et au détriment d’un fonds servant.
Plusieurs modes distincts permettent de constituer une servitude, dont celui de la conclusion d’une convention entre les deux parties (cf. article 639 du code civil). Précisons que les servitudes se distinguent, selon leur nature, entre servitudes apparentes et non-apparentes, et les servitudes continues et discontinues, ces deux distinctions se combinant entre elles comme le précise notamment l’article 691 du Code civil. Il faut encore relever qu’existe notamment des servitudes de passage, de ruissellement, de plantation et de vue, chacune étant soumise à un régime juridique propre. En outre, il est enseigné dès la première année d’études en Faculté de Droit que les servitudes doivent être distinguées des simples actes de tolérance.
En l’espèce, le premier point litigieux a été rapidement réglé par le Tribunal de grande instance de Privas. Une servitude de passage ne peut résulter de la preuve d’une possession utile même immémoriale (alors que la propriété du sol peut être acquise par une prescription utile et trentenaire). Ainsi, en l’absence d’un état d’enclave ou d’un titre recognitif, il ne peut exister de telle servitude (v. art. 682 du Code civil).
Or, le requérant arguait en l’occurrence de l’existence d’un acte authentique désignant de façon expresse l’institution de cette servitude sur le fonds servant du défendeur. Mais l’absence de production dudit document auprès du Tribunal a naturellement conduit le juge à rejeter ce premier moyen.
Le second moyen soulevé par le requérant consistait à invoquer l’existence d’une situation d’enclave de sa propriété, comme le permet l’article 682 du Code civil. Là encore, le Tribunal rejette l’argumentaire du requérant en appuyant sur le caractère « vain » d’une telle demande, précisant que cet état d’enclave est sollicité par « simple souci de commodité et de convenance » et non par nécessité.
Conséquemment, le requérant est donc condamné à verser au défendeur une somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Tribunal de grande instance de Privas, 15 mai 2015