Cabinet Avocats Champauzac
Empiètement ne vaut pas forcément démolition : la sanction doit être proportionnelle

Empiètement ne vaut pas forcément démolition : la sanction doit être proportionnelle

Ce n’est pas un cas d’école : les empiètements d’un mur ou d’un bout de piscine sur le fonds du voisin sont malheureusement trop nombreux.

Soit que le propriétaire qui empiète est indélicat, soit qu’il se croyait légitimement propriétaire en méconnaissant les limites de son propre fonds, ou en ayant construit de bonne foi (parfois avec l’accord de la victime de l’empiètement).

La jurisprudence traditionnelle, fondée sur la réparation intégrale du préjudice et l’article 545 du code civil a toujours été du côté de la victime de l’empiètement qui pouvait demander la démolition (en ce sens, Cour de cassation, 3ème civ., 20 mars 2002).

La bonne foi de l’auteur de l’empiètement était sans effet (Cour de cassation, 3ème civ., 28 juin 2000).

Mais tout évolue, et pas forcément dans le mauvais sens. La mesure est en effet souvent bonne conseillère.

Désormais la sanction de l’empiètement doit être strictement proportionnée. Il n’y a plus obligatoirement suppression de l’ouvrage qui empiète si une solution technique peut par exemple être trouvée. Au visa des articles 544 et 545 du code civil, la Cour de cassation a ainsi jugé que le rabotage d’un mur pouvait mettre fin à l’empiétement sans avoir à le démolir entièrement (Cour de cassation, 3ème civ., 10 novembre 2016).

De même, si une extension de maison empiète un peu (par exemple, en raison de bornes déplacées ou manquantes) sur le fonds voisin, on peut estimer que la même solution s’applique si des solutions techniques peuvent être mises en place.

Si l’auteur de l’empiétement est encore de bonne foi et qu’il prouve cette bonne foi en rapportant la preuve par exemple par des témoignages, que la victime de l’empiétement partiel connaissait le problème et avait indiqué que cela ne le dérangeait aucunement (c’est sa succession à son décès 20 ans après qui revendiquait l’empiétement litigieux), on peut raisonnablement imaginer qu’une solution de même nature sera retenue par le tribunal saisi.

Mais la prudence est la meilleure des garanties. En cas de doute sur la limite, le passage d’un géomètre-expert est obligatoire, pour aller s’il y a lieu jusqu’au bornage judiciaire.

En cas de voisin complaisant et amical qui se dit sans aucune gêne du fait de l’empiétement d’un "bout" de votre piscine, il vaut mieux lui acheter la surface en question, même pour l’euro symbolique ; au pire, il faut lui faire signer une convention de commodat pour une durée correspondant à la durée d’usage de la piscine.