Les communes, communautés de communes ou d’agglomération, les syndicats intercommunaux, les syndicats mixtes, en tant que personnes morales de droit public, peuvent se voir condamnés pénalement, dans certaines conditions prévues par le code pénal, indépendamment de leurs élus.
Mais il n’est pas exclu que la responsabilité pénale de la collectivité soit « accompagnée » de celle de l’élu en charge du service ou de l’opération incriminée, pour une infraction personnelle suffisamment caractérisée.
On n’évoque pas bien sûr ici, la question de la responsabilité pénale de l’élu pour des faits de droit commun (complicité de trafic de stupéfiants par exemple, puisque l’actualité judiciaire traite de ce sujet, violences sur conjoint, prise illégale d’intérêts, ou autre délit d’avantage injustifié, etc..).
L’article 121-2 du code pénal prévoit la responsabilité pénale des collectivités territoriales :
« Les personnes morales, à l'exclusion de l’État, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants.
Toutefois, les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénalement que des infractions commises dans l'exercice d'activités susceptibles de faire l'objet de conventions de délégation de service public.
La responsabilité pénale des personnes morales n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l'article 121-3. »
La Cour de cassation (chambre criminelle) a également rappelé que la responsabilité pénale d’une collectivité territoriale ne pouvait être engagée que par la faute de ses organes ou représentants : « alors qu'il résulte de l'article 121-2 du code pénal que les personnes morales ne peuvent être déclarées responsables que s'il est établi qu'une infraction a été commise, pour leur compte, par leurs organes ou représentants » (Cass. crim., 12 juillet 2016, n° 15-81.924). Il suffit que l’activité en cause puisse (le terme « susceptible » du texte s’entend en ce sens) donner lieu éventuellement à une délégation de service public, sans que cette délégation ne soit effective, pour que la collectivité territoriale engage sa responsabilité pénale en cas d’infraction.
Toutes les activités de services publics industriels et commerciaux sont donc visées : l’eau potable, l’assainissement des eaux usées et pluviales, les déchets ménagers, etc…
Mais aussi des services publics à caractère administratif qui peuvent donner lieu à des conventions de délégation : les musées, théâtres, cinémas locaux, piscines, centres aquatiques, centres sportifs, etc... La palette est donc large.
Mais en revanche, la corruption d’un élu pour favoriser l’octroi de permis de construire illégaux ne porte pas sur une activité susceptible d’être déléguée par convention de délégation de service public ; la commune ne peut engager sa responsabilité pénale du fait de l’élu. L’élu in personam, lui évidemment, est responsable de l’infraction.
Pour engager la responsabilité pénale de la collectivité, il faut cependant une « faute caractérisée » (notion définie par la chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt de 2016, par opposition à celle de « faute délibérée ») de l’un de ses représentants (maire, adjoint, président, vice-président…). Cela peut être par exemple un manquement grave par un exécutif local aux dispositions réglementaires en matière d’horaires de travail pour un agent public qui a subi un accident de ce fait (pas de respect de temps de repos, travail de nuit en infraction à la réglementation…).
Cela pourrait être aussi dû, en matière de voirie routière, à l’installation d’un ouvrage rendu dangereux, ayant causé un accident mortel à un usager, car ne respectant pas les normes réglementaires applicables (par exemple un ralentisseur beaucoup trop haut ou non signalé). Cela peut être aussi une faute caractérisée en matière d’obligation générale de sécurité des agents publics. Les mêmes obligations de sécurité s’appliquent aux agents publics territoriaux et aux salariés du privé.
Cette situation d’obligation légale ou règlementaire de sécurité des salariés est applicable aux collectivités territoriales puisque l’article 23 de la loi du 13 juillet 1983 concernant les droits et obligations des fonctionnaires, mentionne : « Des conditions d’hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail ».
Surtout, le décret 85-603 du 10 juin 1985 pour l’hygiène et la sécurité du travail dans la FPT précise :
En application de l'article L. 811-1 du code général de la fonction publique, dans les services des collectivités et établissements mentionnés à l'article 1er, les règles applicables en matière de santé et de sécurité sont, sous réserve des dispositions du présent décret, celles définies aux livres Ier à V de la quatrième partie du code du travail et par les décrets pris pour leur application, ainsi que par l'article L. 717-9 du code rural et de la pêche maritime. »
Ainsi les règles du code du travail s’appliquent en matière de sécurité dans la fonction publique et notamment les articles L4121-1 et L 4121-2 du Code du travail.
En cas d’homicide ou de blessures involontaires d’un agent public ou d’un tiers du fait d’une faute caractérisée d’un élu pour le respect des règles générales de sécurité, la collectivité territoriale peut être condamnée pénalement. Et la condamnation porte sur une amende qui peut aller, selon l’appréciation du juge pénal, jusqu’à cinq fois l’amende maximum encourue par une personne physique pour la même infraction : le taux maximum de l'amende applicable aux personnes morales est en effet égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques par la loi qui réprime l'infraction (article 131-38 du code pénal).