Cabinet Avocats Champauzac
Copropriété : le règlement intérieur d’un immeuble en copropriété peut-il prévoir des sanctions pécuniaires à l’encontre d’un copropriétaire qui ne respecterait pas les règles ? A quelles conditions ? Et comment les faire exécuter ?

Copropriété : le règlement intérieur d’un immeuble en copropriété peut-il prévoir des sanctions pécuniaires à l’encontre d’un copropriétaire qui ne respecterait pas les règles ? A quelles conditions ? Et comment les faire exécuter ?

Un immeuble en copropriété est normalement régi par un règlement de copropriété adopté par l’assemblée générale des copropriétaires, conformément à la loi du 10 juillet 1965 n° 65-557 fixant le statut sur la copropriété des immeubles bâtis.

Fréquemment, les copropriétaires votent également à la majorité simple un règlement intérieur qui a pour objectif de déterminer les conditions de fonctionnement de l’immeuble (heures d’extinction des éclairages des parties communes, règles de stationnement des véhicules et de livraison, encombrement des parties communes, délais de paiement des appels de fonds, bruits, etc...). La tentation est récurrente, pour les copropriétaires, de vouloir sanctionner financièrement et forfaitairement des manquements et infractions aux règles de ce règlement intérieur. L’objectif recherché est d’éviter que le syndic ne soit obligé de saisir systématiquement le juge à l’encontre d’un copropriétaire récalcitrant ou réfractaire aux respect des règles communes, qu'il le soit directement ou par l’intermédiaire de ses locataires.

1ère question : qu’en est-il de la légalité d’une telle sanction figurant dans le règlement intérieur ?

2ème question : dans la mesure où sa légalité serait avérée, quid de sa mise en œuvre concrète ?

Il convient de ne pas opérer une confusion entre le "règlement de copropriété" qui est un document contractuel ayant une valeur juridique contraignante, prévu par la loi sur la copropriété et donc opposable aux copropriétaires, et le "règlement intérieur" qui n’a pas de valeur juridique en soi et qui définit seulement le mode de fonctionnement de l’immeuble. Pour que le règlement intérieur ait une valeur juridique opposable, il faut qu’il s’agisse d’une clause prévue au règlement de copropriété.

Une clause pénale, qui est une sanction financière forfaitaire appliquée en cas d’infraction à une règle, est à ce titre parfaitement légale si elle figure dans le règlement de copropriété. S'il est nécessaire de modifier le règlement de copropriété pour intégrer ce type de clause, le vote s’effectuera à la majorité des deux tiers prévue par l’article 26 de la loi de 1965. La jurisprudence valide depuis les années 1990 une clause pénale d’un règlement de copropriété infligeant une pénalité forfaitaire, par exemple pour sanctionner un stationnement interdit ou l'encombrement illicite de parties communes. Une mise en demeure préalable du syndic sera nécessaire avant d’infliger la pénalité, s'agissant de dommages et intérêts. Si la pénalité est manifestement excessive, le juge pourra la réduire, en application de l’article 1231-5 du code civil relatif à la modulation de la clause pénale.

1ère conclusion : il n’est pas possible d'insérer une clause pénale dans le règlement intérieur pour une infraction aux règles d’utilisation des parties communes, si cette même clause n’est pas prévue par le règlement de copropriété. Elle serait sans valeur juridique, et donc inopposable.

2ème conclusion : se posera ensuite la question de la constatation du manquement. Si, par exemple, des individus se promènent avec des chaussures de ski dans les parties communes de l'immeuble ou déposent des encombrants dans le parking souterrain de la résidence, qui sera habilité pour leur demander de décliner leur identité et désigner l’appartement qu’ils occupent, le cas échéant en tant que locataires ?

A cet égard, seul le syndic est le représentant légal du syndicat des copropriétaires. En pratique, la copropriété ne va pas rémunérer un garde (concierge, par exemple) assermenté pour constater les infractions et dresser un rapport de constat au syndic, ou missionner un commissaire de justice. De façon générale, le syndic devra notifier une mise en demeure de cesser l’infraction dans un délai raisonnable, soumise à l’appréciation du juge en cas de contestation. Par ailleurs, c’est le copropriétaire concerné qui supportera la sanction financière, à charge pour lui de se retourner contre son propre locataire le cas échéant. 


En conclusion générale, les interdictions diverses figurant dans le règlement intérieur n’ont en principe qu’une valeur incitative, sans force comminatoire.

Mais un règlement intérieur coercitif peut s’avérer parfois dissuasif, sans qu’il ne soit nécessaire de le mettre forcément à exécution. Dans ce cadre, l’objectif recherché d’un bon fonctionnement de l’immeuble peut être atteint.